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La cerise manquante au gâteau

19 janvier 2009

Soirée de bienfaisance

Soirée de Bienfaisance dans un grand hôtel à Tananarive

A l'automne 2008, pendant mes vacances chez elle, ma fille a eu la gentillesse de m’inviter à une soirée de bienfaisance qui se tenait dans l’un des plus grands, sinon le plus grand et le plus chic, hôtel de la capitale malgache. Cet établissement fait partie d’une chaîne hôtelière internationale et de réputation universelle. La soirée était organisée, entre autres, par une prestigieuse association omniprésente en ce monde et fondée par l’adhésion des membres aisés de la société civile. Elle est surtout publiquement connue pour ses diverses actions de haut standing, parmi lesquelles des réunions charitables en faveur des nécessiteux. Ma fille ayant des collègues affiliés à cette digne association, a tenu à faire plus qu’un acte de présence en y conviant plusieurs invités.

La finalité de cette rencontre étant avant tout charitable, le programme affiché était sobre mais néanmoins sympathique. Cette soirée avait été baptisé « Ober Feste». Il était prévu un repas dansant avec un plat unique de choucroute au menu. Un orchestre de qualité, bien connu sur la place assurait l’animation. La bière locale était servie à volonté. De plus, le nom à consonance plutôt germanique de cette soirée incitait à imaginer une choucroute de qualité quasi munichoise. Comme j’adore la choucroute je salivais d’avance.

A l’heure convenue, c’est-à-dire vingt heures, nous arrivons sur le parking devant l’hôtel. Nous parvenons à trouver une place pour garer notre voiture, sur la voie publique car le parking, trop petit, est déjà totalement occupé.

A vingt heures, à Antananarivo, il fait déjà nuit noire depuis un bon moment. Cette profonde obscurité, insensible aux timides éclairages au sol, valorisait, au sommet de la façade de l’immeuble, la luxueuse enseigne lumineuse qui affichait, en sept grandes lettres de néon bleu, le nom de l’établissement. Les cinq étoiles qui soulignaient ce nom sublimaient le prestige de cette chaine hôtelière planétaire, propriétaire des lieux. Dès mon arrivée cette riche apparence n’a pu que me donner une très bonne impression des lieux. Sans nul doute, nous allons siéger dans un hôtel de marque, à la hauteur de sa réputation.

Nous entrons dans l’hôtel et un fléchage, précis et discret, nous dirige vers le premier étage. Parvenu à ce niveau, dans le vaste espace juste devant l’entrée de l’immense salle prévue pour nous accueillir tous, nous sommes cordialement réceptionnés par l’un des membres de l’association organisatrice, un collègue à ma fille. Il nous décrit sommairement la situation du moment et nous invite chaleureusement à nous munir d’une consommation de bienvenue. C’était au choix soit une bière, ou, moyennant finance, un whisky. Le prix de la bière étant inclus dans le prix du billet d’accès à la soirée, cela nous donnait l’impression, si l’on choisissait cette dernière, de se faire offrir gratuitement une consommation.

Nous acceptons l’aimable invitation et muni de notre boisson, nous faisons un petit tour, dans ce hall d’entrée, avant de rejoindre notre place dans la grande salle réservée pour la réception. Ma fille salut des connaissances et se fait saluer par de nombreuses personnalités. Il faut dire qu’en ce lieu, elle évolue dans un milieu qui est un peu le sien.

Ma fille ayant terminé son premier cercle de civilité nous pénétrons dans la salle de réception. L’orchestre joue un air rythmé et un duo mixte accompagne la musique de leur chant tandis que la piste de danse est déjà pratiquement toute occupée. Un placeur nous prend en charge et nous accompagne vers notre table presque totalement entourée par des membres de l’Union, tous collègues de bureau.

Assez vite, la grande salle est entièrement remplie. Les danseurs sont toujours aussi nombreux et actifs sur la piste qui leur est réservée et les discussions autour de chaque table et de table à table, ne tarissent pas. La bière locale est proposée généreusement par des serveurs zélés et attentifs, porteurs de volumineux pichets en verre. Bref, par son affluence et son ambiance cette belle soirée est incontestablement une réussite. Les organisateurs pouvaient déjà se réjouir du succès de leur initiative, d’autant plus noble qu’elle était réalisée au profit d’œuvres caritatives.

Environ deux heures après l’installation à notre table les plateaux de victuailles font leur apparition. Les plats composant la choucroute arrivent et sont disposés sur chaque table. Visiblement il n’y aura pas pénurie et vous saurez pourquoi, plus loin dans ce texte. A notre table deux ou trois personnes se dévouent pour organiser le service et distribuer à chaque convive, de la choucroute, des pommes de terre, de la charcuterie et de la viande.

Mon assiette copieusement garnie arrive devant moi. Je suis immédiatement saisi par l’apparence fort peu appétissante de son contenu ! Mais encore me fallait-il goûter pour avoir une opinion argumentée et porter un jugement consolidé par une réalité. Voilà la réalité :
 Le chou : je ne saurais comment qualifier la présentation de ce légume dans l’assiette ! Cela ressemblait à une épaisse bouillie verdâtre et pâteuse, suant grassement une matière adipeuse indéfinissable. Je l’ai goûté du bout des lèvres. Ma première idée a été largement confirmée. Dans cet état, ce chou n’était pas mangeable. Il n’aurait jamais dû être permis de le servir à un repas, surtout dans une soirée pompeusement nommée « Ober fest ».
 La charcuterie : Il m’a été attribué une saucisse noire. C’est la première fois que je voyais cette couleur pour une saucisse dans de la choucroute. Quant au goût, il était tout simplement exécrable, et l’odeur pestilentiel. J’assimile à une provocation le fait d’oser présenter sur une table un aliment aussi infect.
 Les pommes de terre : Belle présentation d’autant plus qu’elles étaient pratiquement crues ce qui a grandement facilité leur remarquable tenue. Quant au goût cela dépend du convive ! L’on aime ou l’on n’aime pas des patates crues au repas. Personnellement je déteste.
 La viande : d’origine indéfinissable tout juste mangeable, mais bizarrement distribuée avec une grande parcimonie.
 La bière : de fabrication locale et de bonne qualité. Elle était égale à sa renommée.

 En résumé dans un établissement prestigieux et avec des organisateurs aussi notoires, je dirais aimablement qu’il était honteux d’oser servir à table un repas à ce point raté. Par simple décence, et pour sauver les apparences, il aurait été astucieux de débaptiser au dernier moment cette repoussante préparation pour la rebaptiser  « choux ultra gras à la mode du maître coq de l’hôtel ». Heureusement que l’orchestre de qualité était là pour maintenir élevée l’excellente ambiance sur la piste de danse et dans la salle, faisant ainsi passer le repas largement au second plan.

Maintenant vous comprenez mieux sans doute, pourquoi je ne cite ici ni le nom de l’hôtel, ni le nom de la principale association qui a organisé cette soirée dont le but est, par ailleurs, louable. Je ne voudrais surtout pas nuire à tous ceux qui, en ce monde, sont plus ou moins liés à ces noms universellement connus. Ailleurs, cela ne pourra jamais être pire !

En partant j’ai demandé le livre d’or, ou, à défaut, le cahier des réclamations pour pouvoir exprimer, par écrit, le ressentiment que j’éprouvais uniquement vis-à-vis du repas. Ces deux documents étaient inexistants ! Je tenais seulement à faire savoir que la tromperie, dont j’avais été l’une des nombreuses victimes, n’était quand même pas passée inaperçue.

En conclusion, par l’affluence et par l’ambiance, cette soirée à été, à mon avis, une incontestable réussite sur le plan humanitaire. Je ne regrette pas d’avoir été l’un des participants. Nous savions que nous n’étions pas venus pour une dégustation gastronomique, même si l’appellation de cette soirée aurait pu laisser espérer quelque chose d’approchant ! Pour autant, en ce qui concerne uniquement le repas, et dans le contexte où nous étions placés, nous étions loin d’être préparés à supporter une supercherie de cette envergure. La plus humble des gargotes en milieu modeste n’aurait pas hésité à jeter aux cochons une préparation culinaire aussi repoussante  Mais un très grand hôtel de luxe, de réputation mondiale peut se permettre un tel affront !

Un grand merci à ma fille qui eu la gentillesse de m’inviter à cette soirée de bienfaisance. Le repas n’était que l’insertion, dans la soirée, d’une farce de fort mauvais goût largement compensée par le talent de l’orchestre, par la convivialité entre participants et par la chaleureuse ambiance omniprésente dans la salle. Le repas n’était que la cerise qui a  malheureusement manqué au gâteau !

Une question : L’hôtel n’a-t-il pas été le premier bénéficiaire de cette soirée pourtant prévue au profit d’associations caritatives ?

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La cerise manquante au gâteau
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